Passer à la semaine de 30 heures, sans réduction de salaire. Une galéjade ? Probablement une hérésie d’une autre ère pour le patron du Medef, Pierre Gattaz, qui veut briser les tabous et faire sauter les verrous. Mais lesquels ? D’abord le CDI, qu’il qualifie d’inquiétant et d’anxiogène. Mais également le Code du travail, qu’il souhaite réduire à la portion congrue. Et la hiérarchie des normes, puisqu’il voudrait privilégier les accords d’entreprises sur les accords de branches, et ceux-ci sur le socle commun de la loi. « Cela veut dire, commente-t-il, qu’un chef d’entreprise pourrait négocier directement avec ses salariés la durée et l’organisation du travail sans en référer aux branches ou à un Code du travail devenu beaucoup trop compliqué« . Travailler 40 heures par semaine ? Davantage ? Payées 35 ? Pourquoi pas, rêve tout haut la patron des patrons. La semaine des 30 heures n’est cependant pas une utopie pour tout le monde en Europe. Plusieurs villes de Suède testent en effet la journée de travail de six heures. Et les résultats sont au rendez-vous. Pour le bien-être des salariés, en premier lieu, qui se disent moins épuisés et conjuguent plus harmonieusement travail et vie privée. Nombre de femmes peuvent passer du temps partiel au temps plein. Mais pour l’économie aussi, qui comptabilise moins d’absences, moins d’arrêts maladie, moins de pression et d’erreurs, et note des gains de productivité. Du coup, après les services publics de certaines villes, des entreprises privées s’y mettent à leur tour. Comme des concessionnaires de Toyota, par exemple. Alors briser le tabou d’une nouvelle RTT ? Chiche !
Isabelle Avran – NVO – novembre 2015